Imputation comptable des indemnisations de fournisseurs au titre de l’imprévision
Une réponse ministérielle précise enfin le régime des imputations comptable des indemnités d’imprévision
Pour faire face aux difficultés d’exécution des contrats de commande publique tenant à la flambée des prix des matières premières et composants et à des pénuries d’approvisionnement, la circulaire n° 6338-SG du 30 mars 2022 a rappelé les conditions de mise en oeuvre des indemnisations de fournisseurs au titre de l’imprévision. Le socle légal et la jurisprudence ont précisé que l’indemnité d’imprévision relève de la sphère contractuelle, quand bien même le fait générateur de l’indemnisation est étranger au contrat. S’appuyant sur ces éléments, la direction générale des finances publiques a initialement analysé l’indemnité d’imprévision comme un complément de prix, permettant ainsi d’enregistrer budgétairement et comptablement ces sommes sur le compte d’exécution du marché public en section d’investissement pour les marchés conduisant à la réalisation ou à la livraison de biens immobilisés. Au regard des difficultés signalées dans la mise en oeuvre des diverses solutions juridiques présentées dans la circulaire n° 6338-SG du 30 mars 2022, le Gouvernement a saisi le Conseil d’État d’une demande d’avis sur la portée des dispositions du droit de la commande publique relatives aux modifications des contrats en cours, ainsi que sur leur articulation avec les règles dégagées par la jurisprudence en matière d’imprévision. Dans son avis du 15 septembre 2022, l’assemblée générale du Conseil d’État a précisé que l’indemnité d’imprévision ne peut être regardée comme une conséquence financière de l’exécution du marché : elle a pour objet de compenser les charges extra-contractuelles subies par le titulaire et, à ce titre, elle n’a pas à figurer dans le décompte général et définitif. Si le bouleversement de l’économie du contrat par suite de circonstances imprévisibles ne peut être établi qu’après complète exécution du marché, l’indemnité ne pourra être versée qu’après notification du décompte général et définitif. Dès lors, le Conseil d’État est venu apporter une distinction entre le régime de l’imprévision et celui du droit de la commande publique : l’indemnisation sur le fondement de l’imprévision constitue un véritable droit pour le titulaire, dont le montant peut d’ailleurs être fixé, à défaut d’accord entre les parties matérialisé par une convention, par décision de l’autorité judiciaire, tandis que la modification du contrat pour circonstances imprévisibles prévue par le code de la commande publique est décidée entre les parties. Par conséquent, sur la base de l’analyse du Conseil d’État, l’indemnité d’imprévision n’a pas pour objet de compenser la hausse du prix des biens ou des services à l’euro près, mais de dédommager partiellement le préjudice subi par le titulaire du fait de l’événement imprévisible. Toutes les sommes versées au titre d’une convention d’indemnisation signée à compter du 15 septembre 2022, qualifiées par le Conseil d’État de « charges extra-contractuelles », doivent ainsi faire l’objet d’un enregistrement budgétaire et comptable en section de fonctionnement qu’il s’agisse d’un marché de fonctionnement ou d’investissement ; la direction générale des finances publiques a communiqué ces éléments de doctrine comptable au réseau des comptables publics le 23 décembre 2022. Enfin, les sommes versées par l’acheteur public au titulaire du marché public sur le fondement de la théorie de l’imprévision doivent être soumises à la TVA (voir en ce sens, les commentaires publiés au Bulletin officiel des finances publiques-Impôts sous la référence BOI-TVA-BASE-10-10-50 §260). Bien entendu, lorsque cet acheteur public est lui-même assujetti à la taxe sur la valeur ajouté (TVA), il peut, le cas échéant, déduire la TVA correspondante par la voie fiscale, dans les conditions prévues par les dispositions de l’article 271 du code général des impôts (CGI)